Enjeu de L'Economie : Nervosité sur le Front Salarial !

La nervosité sur le front salarial qui se fait sentir depuis ces dernières semaines gagne en intensité et aborde un tournant critique avec l’ouverture des discussions, demain, entre la Mauritius Sugar Producers Association (MSPA) et le Joint Negotiating Panel syndical au sujet d’un nouveau Collective Agreement.

Enhardie par les premiers résultats obtenus avec des révisions salariales de 19% et de 20% en faveur des employés de la Corporation Nationale de Transport (CNT) et de la Cargo Handling Corporation (CHC) dans le port, la General Workers Federation (GWF) s’engage dans une offensive tous azimuts pour des augmentations salariales dans d’autres secteurs économiques. La finalité de cette démarche reste l’introduction d’un salaire minimal de Rs 13 300 par mois, chiffre travaillé à partir des données découlant du Household Budget Survey de Statistics Mauritius de mai dernier.

En marge de ces négociations syndicales, la MSPA joue la carte de la productivité et de la flexibilité avec l’adoption du concept de 24/7 tout en préconisant une refonte de la structure des salaires en vigueur dans l’industrie sucrière. À ce dernier chapitre, la MSPA prévoit d’inclure la prime de présence dans la nouvelle structure salariale.

Néanmoins, les conditions de travail, en l’occurrence la formule de 24/7 pour une plus grande flexibilité dans l’organisation du travail dans ce secteur, l’extension des heures de travail et la révision du travail à la tâche, suscitent de véritables passions avant même que les partenaires n’échangent les premiers arguments. À ce stade, la MSPA se garde d’avancer le quantum de la révision salariale, préférant mettre à l’avant la proposition d’une “fair increase in wages.”

À peine la MSPA aura rendu public, jeudi matin, son document de base pour des négociations avec les syndiacts du Joint Negotiating Panel (JNP) de l’industrie sucrière que la GWF a déclenché les hostilités syndicales avec un slogan qui risque de faire mal. “MSPA ek tablisman malad. Zot bizin géri zot de zot mentalité esklavazist ! Gérizon koumans par zot mem !” rétorque Ashok Subron, animateur de la GWF, qui a fait sienne le leitmotiv de la récente campagne pour la préservation de l’environnement bénéficiant du financement du conglomérat sucrier Terra.

Code Noir
La proposition de la MSPA en vue de l’introduction du concept de 24/7 est dénoncée avec véhémence par la GWF. “Maintenant, l’industrie sucrière veut davantage de flexibilité en vue de transformer les salariés dans les champs et au moulin en de vulgaires objets capables de broyer pendant 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Il ne faut pas parler de révision salariale avec le patronat sucrier. Il ne veut rien entendre. Ce qu’il veut c’est une réédition du Code Noir. Koumadir bizin travay soley levan ziska soley kousan”, poursuit le syndicaliste.

Rejetant les propositions de l’industrie sucrière, les syndicalistes Serge Jauffret et Devanand Ramjuttun sont arrivés à la conclusion que “la formule de 24/7 constitue une remise en question pure et simple de la semaine de 40 heures dans l’industrie sucrière.” Ils contestent également toute velléité d’extension des heures de travail avec la semaine de 48 heures, de la révision du boni de présence annuelle ou encore des changements dans les provisions pour le service médical en faveur des employés.

“La proposition de la MSPA en vue d’indexer en partie les salaires sur le prix du sucre sur le marché mondial, alors que Maurice n’exporte pas sur ce marché, est un véritable attrape-nigaud et les salariés de l’industrie sucrière ne se laisseront pas prendre dans ce piège. Le document de la MSPA frise l’intoxication en tentant d’accréditer la thèse que les artisans et les laboureurs gayn tro boukou kas”, s’insurgent les dirigeants de la GWF, qui appellent à la mobilisation pour une “campagne sucrière qui s’annonce chaude” à la veille des ces négociations syndicales.

Toujours sur le plan des revendications salariales, la GWF prévoit une campagne de sensibilisation nationale en vue de l’introduction d’un salaire minimal de Rs 13 300. “Nous sommes arrivés à ce chiffre de Rs 13 300 sur la base des derniers résultats du Household Budget Survey de mai dernier. La grosse majorité des employés du privé touche des salaires inférieurs à Rs 13 300 par mois. Le moment est venu de rétablir la situation”, avancent les syndicalistes.

De son côté, la MSPA a présenté à la presse, jeudi, ses principales propositions en vue d’assurer la viabilité de l’industrie sucrière. Les représentants de l’industrie sucrière se sont appesantis sur le fait que la masse salariale annuelle pour les artisans et les laboureurs est de Rs 1,3 milliard et que chaque 1% d’augmentation salariale équivaut à Rs 13 millions additionnelles.

Flexibilité/ productivité
Aucun chiffre n’est avancé pour la révision salariale dans le document de la MSPA, qui préconise “a fair increase in wages based on an agreement reached between parties with regards to proposals aimed at increased productivity and flexibility at work and loss of purchasing power during period 2010/2013.”
En parallèle, la MSPA propose des changements dans la structure salariale avec l’inclusion de la prime de présence. “Le paiement des Fringe Benefits, bonis et autres primes de même que les heures supplémentaires représente entre 50 et 55% des revenus des salariés”, ajoute la MSPA pour justifier sa démarche.

Les autres propositions sont l’introduction d’un nouveau régime de travail basé sur le 24/7, l’extension des heures de travail, la révision du Productivity Bonus aux coupeurs de cannes, la révision du travail à la tâche et la reprise du travail le 3 janvier au cas où la récolte sucrière n’est pas bouclée au 31 décembre.

En résumé, la MSPA affirme que “the participation of the workforce in the efforts to improve productivity and flexibility will be balanced by a fair and mutually agreed upon adjustment/increase in remuneration and the introduction of an annual bonus scheme linked to the price of sugar.”

Devant les premières prises de position, le bras de fer syndical s’annonce chaud car le Joint Negotiationg Panel prévoit déjà de convoquer une assemblée générale des employés de l’industrie sucrière le 1er septembre pour se prononcer sur “séki MSPA pé rod imposé.”