Joël De Rosnay, éminent professeur et conseiller spécial du Premier ministre en matière de développement durable, fait en effet un constat alarmant de la situation, six ans après le lancement de ce projet qui s’annonçait révolutionnaire.
Au début, le projet MID faisait pourtant rêver tout le monde. Imaginant une île 100 % verte, durable et propre, la population, le gouvernement, les écologistes et le secteur privé étaient loin de s’imaginer qu’ils s’embarquaient dans une vraie galère.
Six ans après, le rêve a viré au cauchemar. Non seulement les objectifs du MID sont encore loin d’être atteints, mais le taux national de production d’énergie renouvelable est en train de chuter irrémédiablement. Les qualificatifs ne manquent désormais plus, dans la presse et ailleurs, pour désigner ce projet si ambitieux : «mort-né», «coquille vide», «drom perse»…
«Le pays est en train de rater le tournant des énergies renouvelables, et cela à cause d’intérêts privés et à court terme. Tout s’accélère au niveau mondial et Maurice regarde la comète passer. Nous étions en avance, nous sommes désormais en retard», a déclaré Joël de Rosnay dans une interview accordée à l’express cette semaine.
Le professeur se référait à une étude du Kolektif pou Lenerzi Renouvlab qui indique qu’il y a dix ans, le pays produisait 27 % d’énergie renouvelable. Aujourd’hui, malgré l’avènement du MID, ce taux est en net recul.
Alors même qu’Alteo a fait une demande de permis EIA pour modifier son usine en centrale 100 % charbon et que l’ombre de CT Power grandit sur Albion et ses alentours, les initiatives gouvernementales et privées en matière de développement durable font pâle figure. Le lancement d’une ferme éolienne à Plaine-des-Roches (après de longues négociations) et celui d’une centrale photovoltaïque à Bambous sont certes des pas dans la bonne direction.
Cependant, face aux géants du charbon, ces énergies vertes ne pourront en aucun cas faire basculer la balance du côté du renouvelable. En prenant en compte la mise en opération de tous ces projets, charbon et renouvelable inclus, le Kolektif prévoit en effet que la part des énergies vertes continuera à chuter dans les années qui viennent.
«Les responsabilités sont nombreuses, tant au niveau du gouvernement que de celui des industriels», estime Joël de Rosnay. Mais tout n’est pas perdu pour autant, soutient-il. Si, pour le Kolektif Pou Lenerzi Renouvlab, le MID est «cliniquement mort», le conseiller du Premier ministre garde espoir. «Il suffit d’une volonté politique soutenue par la population», argue l’éminent professeur.