Jean-Jacques Vallet : « Tout N’est Pas Rose »

Dans son discours-bilan, Jean Jacques Vallet évoque l’état actuel de l’industrie touristique mauricienne. « Tout n’est pas rose » a-t-il souligné.

Voici son discours dans son intégralité : 

"Après mes deux ans de mandat à la présidence de l’association, je suis heureux et fier de passer le flambeau à un nouveau président, au bout de beaucoup d’efforts et d’engagement fort envers les membres, envers les autorités et envers tous les autres stakeholders. J’ai essayé de la meilleure façon qui soit, et à la mesure des moyens disponibles, de répondre aux nombreuses attentes et exigences des membres et aux autres sollicitations de part et d’autre, avec toujours à l’esprit, l’avancement du secteur.

A l’heure du bilan, je dois dire que tout n’est pas rose. 

La crise de la zone euro, la crise de l’aérien avec la flambée de prix du carburant, la roupie forte, ainsi que l’inadéquation (le mismatch comme on le dit mieux en anglais) entre l’offre - chambres d’hôtel, IRS, RES, bungalows et autres – tout confondu, et le nombre de places d’avion disponibles, font que l’industrie Mauricienne souffre terriblement ces jours-ci, et bien plus que les îles concurrentes de la Région, les Seychelles et les Maldives.

L’année 2011 s’est terminée avec un bilan mitigé. Le taux de croissance de 4% seulement a été inférieur au 7% anticipé pour l’année ; la barre d’un million de touristes n’a pas été franchie, et le taux d’occupation des hôtels a stagné à 65%. La lente reprise connue en 2010 ne s’est guère renforcée en 2011. Le taux très moyen de 65% d’occupation pour l’année se traduit par des pertes opérationnelles pour une majorité d’opérateurs.

Les premiers mois de 2012, avec une croissance marginale de 0,6% des arrivées par rapport à la même période en 2011, avec plus de chambres sur le marché, ne sont guère encourageants. La nouvelle prévision officielle est de 1,6% seulement pour l’ensemble de l’année 2012. 

La diversification de nos marchés doit donc se poursuivre même si les résultats ne seront pas visibles à court terme. Le marché chinois, qui a connu une croissance de 100% en 2011, puis de 60% jusqu’en mai 2012, représente seulement 2% de nos touristes. Le marché indien quant à lui représente un peu plus de 5%, et le marché russe touche les 3% de nos arrivées touristiques. Les nouveaux marchés représentent donc un immense challenge et, même s’il n’y a plus de surplus dégagé par nos marchés traditionnels qui sont en chute libre, il nous faut trouver des moyens conséquents pour poursuivre cet effort de diversification.

Durant l’année il y a eu de nombreuses interventions et beaucoup de questions posées de part et d’autre sur le devenir du secteur face à la crise. Je vais, pour ma part ce soir, commenter trois dossiers.

D’abord,  l’aérien. 

Il est selon nous devenu urgent de mettre en place les structures nécessaires pouvant permettre au pays d’exercer en toute confiance ses choix en matière de politique d’accès aérien. Le secteur hôtelier souhaite pouvoir être partie prenante d’un corps consultatif, ou décisionnel, pouvant orienter les grands choix stratégiques du pays en matière de politique d’accès aérien. C’est la clé essentielle à notre regain de croissance !

J’ajouterais aussi que nos pays concurrents directs, même s’ils sont à une autre phase de leur développement touristique, font bien – malgré la crise. Une bonne partie de l’explication, sans vouloir nier leur compétitivité en termes d’accès et des prix du billet d’avion, se trouve dans leurs choix de politiques d’accès aérien. Entre 2009 et 2011, le taux moyen de croissance annuelle des arrivées touristiques étaient de 21% pour les Maldives, de 12% pour les Seychelles et de 46% pour le Sri Lanka. Et l'île Maurice ? 5,4%...

Cette année, les Maldives nous dépasseront en termes d’arrivées touristiques, atteignant la barre du million de touristes bien avant nous. L'île Maurice n’est plus leader de l’Océan Indien. 

Deuxième dossier, le marketing et la promotion de la destination île Maurice.

La restructuration de nos efforts de marketing et de promotion demeure une priorité absolue au niveau des institutions, des outils, des ressources, des agences extérieures, ainsi que des budgets, bien évidemment. Et la MTPA est appelée à se réinventer afin de pouvoir mieux répondre aux exigences des nouvelles conditions de marché. Une démarche volontariste forte est attendue dans ce sens.

Enfin, troisième dossier, la crise de la zone Euro et la stabilité de la roupie mauricienne.

Nous avons évoqué à plusieurs reprises ces dernières années combien la roupie relativement forte, qui ne suivait pas la tendance des monnaies de nos principaux partenaires commerciaux, affectait notre compétitivité. Si nous prenons par exemple rien que les deux devises principales, l’euro et la livre sterling, qui ensemble comptent pour environ 75% de nos recettes touristiques, le manque à gagner depuis 2009 dépasse la barre des Rs 3,3 milliards. Et rien qu’en mai 2012, l’euro à la baisse nous a coûté près de Rs 80 millions.  Ceci a du certainement contribuer à du cost cutting, tant au niveau des prestations que du personnel, affectant du coup la qualité des différents etablissements.

Dans le contexte de la mise en place annoncée d’une ligne de crédit spéciale à l’intention des secteurs manufacturier et du tourisme, j’ose espérer que ses modalités sauront être à la hauteur de nos besoins, non seulement en termes de quantum afin que nous puissions y retrouver un peu de ‘hedging’, mais aussi en termes de coûts de transaction et de taux d’intérêt applicables. A aujourd’hui, son mode d’application demeure encore flou à nos yeux.

Conclusion 

En guise de conclusion, au nom de l’AHRIM et de ses membres, je voudrais vous remercier les différentes autorités qui nous ont soutenus durant l’année. Nous restons confiants, malgré la conjoncture difficile, que tout reste encore entre nos mains pour décider de l’avenir de notre industrie. Nous allons continuer à travailler, avec l’ensemble des stakeholders afin que le secteur puisse sortir de cette crise le plus rapidement possible.

Merci à tous ceux qui ont oeuvré au sein de nos differents comités et qui ont contribué à faire avancer la cause de l’industrie. Je voudrais également remercier mes collègues du Conseil pour leur soutien et leur engagement au niveau de l’Association. Et enfin, merci à Patrice, Jocelyn, et l’équipe du bureau de l’AHRIM pour leur dévouement.

François Eynaud est le nouveau président de l’association et je souhaiterais le féliciter à ce titre. François apportera certainement une contribution significative à notre association, et je pense qu’il pourra compter sur le nouveau Conseil ainsi que l’ensemble des membres pour représenter l’industrie comme il se doit. Bonne chance François, et félicitations et bonne chance également au nouveau Vice-Président Paul Jones".