Traitement de l’Information: la «Manipulation» Dénoncée à la MBC

Certains employés, qui ont accepté de parler sous le couvert de l’anonymat, vont même jusqu’à dire que «c’est un coup d’État à la Bhadain Boys». Ou encore, «c’est du jamais vu ! Autant dire que l’on préfère encore Dan Callikan».

Ce qui a mis le feu aux poudres : la manière dont a été couvert le rassemblement du Parti travailliste dimanche 20 septembre. Les images diffusées par la MBC montrent non seulement l’ex-Premier ministre (PM) à Kewal Nagar dans le cadre des célébrations du 115e anniversaire de la naissance de son père, mais aussi des images du coffre-fort rempli de liasses de billets saisi à son domicile le 6 février.

En fait, explique-t-on, c’est la journaliste Manisha Jooty qui avait été assignée à la couverture de l’événement. Mais au final, c’est son collègue Joy Neeraye, qui devait être en congé, qui s’est occupé du montage de la vidéo. Ce dernier est décrit comme «un des hommes de confiance» du ministre de la Technologie Roshi Bhadain.

Nous apprenons, de sources concordantes, que ce jour-là, la journaliste Manisha Jooty avait déjà soumis son texte selon l’angle décidé par la rédaction la veille. «Elle avait choisi des extraits où l’ancien PM parlait de son père parce qu’il avait été décidé, lors du briefing, que l’on allait davantage axer le reportage sur SSR et son village natal», confie une source au sein de la MBC.

Or, lorsque la journaliste a regagné le bureau après l’événement, Joy Neeraye lui aurait demandé d’ajouter des images du coffre-fort. Ce qu’a refusé de faire Manisha Jooty. Selon les dires de plusieurs préposés, c’est Joy Neeraye, une fois la journaliste rentrée chez elle, qui a monté la vidéo.

Autre élément troublant : le reportage sur le rassemblement du PTr n’aurait pas été vu par un supérieur hiérarchique avant la diffusion, comme prévu par le règlement. «C’est normalement le directeur, le Head of News ou un journaliste senior qui s’en charge», explique un autre journaliste qui travaille à la MBC depuis plus de 20 ans.

Jointe au téléphone, Manisha Jooty n’a pas voulu faire de commentaire. Joy Neeraye a, lui, affirmé qu’il devait «avoir la permission du Chairman de la MBC avant de pouvoir parler». Sollicité, le président du conseil d’administration de la station de télévision nationale, Dev Phokeer – qui est aussi secrétaire permanent au ministère de la Technologie – a déclaré : «Je ne sais pas du tout de quoi vous parlez, il faudra que j’aille m’enquérir avant de pouvoir en dire plus.»

Plusieurs employés parlent aussi de la couverture du bras de fer entre KPMG et Roshi Bhadain. «Ce jour-là, le journaliste devait faire un reportage qu’il a laissé tomber pour s’occuper de ce sujet. Et il nous revient que le ministre voulait que l’on passe la lettre de KPMG Afrique du Sud dans son intégralité et c’est Joy Neeraye qui s’en est chargé», explique une autre source. Lors de la couverture de la séance parlementaire de mardi dernier, c’est toujours Joy Neeraye qui aurait tenté d’ajouter trois insertions du ministre Bhadain dans un reportage qui avait déjà été monté, selon nos sources.

Sans compter que jeudi, «il a monté un reportage en secret sur le fait que les autorités britanniques enquêtent sur Navin Ramgoolam. Il avait alors utilisé les images du coffre-fort. Mais personne n’était au courant».

Contacté par l’express à plusieurs reprises sur son portable dans le cadre de la rédaction de cet article, le ministre des TIC Roshi Bhadain est resté injoignable.

La MBC menace de poursuivre l’express

L'express:

Réagissant à cet article, la station de radiotélévision nationale a menacé de nous poursuivre. Dans un long communiqué, la MBC nous accuse de ne pas avoir respecté notre code de déontologie car nous nous serions basés sur des sources anonymes.

La MBC a justifié le traitement de ses informations de dimanche en faisant une nouvelle fois le procès de Navin Ramgoolam et en montrant les images de ses coffres-forts.

Nous maintenons nos informations et soulignons que nous avons parlé au président du board Dev Phokeer, au journaliste Joy Neeraye, qui a dit qu’il devait avoir une «permission» avant de nous répondre. Et nous avons tenté, en vain, de parler au ministre responsable de la MBC, Roshi Bhadain. Personne n’a voulu commenter le malaise grandissant au sein de la rédaction.