Emploi : Entre Illusions des Jeunes et Besoins du Marché

10 years, 8 months ago - August 02, 2013
Emploi : Entre Illusions des Jeunes...
C’est la saison des job fairs!

Événement phare dans la vie des jeunes étudiants en quête d’emploi. Enfin l’occasion d’avoir une rencontre avec les professionnels évoluant dans la filière qu’ils ont choisie. Sauf que ce rendez-vous conduit souvent à un clash entre leurs aspirations et la dure réalité…
Avec leur diplôme en poche, ils auraient dû avoir un emploi rapidement. Du moins, c’est ce qu’on leur a affirmé pendant toutes leurs années universitaires. « J’ai envoyé mon CV à la compagnie X et je n’ai toujours pas eu de réponse. Cela fait un mois que j’attends. Et donc pour l’instant je reste à la maison ». Un cas de figure très répandu parmi les jeunes mauriciens. Mais qu’est-ce qui les amène à cette situation ? Est-ce un manque de motivation de leur part, ou le fait que les employeurs ne leur donnent pas leur chance ?
Nous avons rencontré Sonia (prénom fictif), 22 ans, à la job fair du Charles Telfair Institute (CTI). Cela fait un mois qu’elle a obtenu son diplôme en marketing. Elle s’est embarquée dans une course effrénée pour trouver un emploi. Ayant entendu parler de la job Fair du CTI, elle pensait pouvoir dénicher un job. Cependant, elle a été déçue. « Il n’y avait pas autant d’entreprises que ce à quoi je m’attendais. De plus, certains informateurs étaient incapables de vendre leur société. Ils ne semblaient pas motivés à trouver de nouvelles recrues ». Et d’ajouter que cela l’aurait beaucoup aidée « s’ils y mettaient du leur ».
Sonia nous confie n’avoir jamais travaillé. Néanmoins, elle a quelques stages à son actif. Notre interlocutrice semble dans le flou quant à ses projets d’avenir. Elle dit ne pas savoir dans quel secteur elle aspire à évoluer. « Tout ce que je sais c’est que ce sera dans le marketing et pas dans le secteur financier ». Avant d’entamer des études en marketing, elle avait pour objectif de faire de la décoration intérieure. Le hic ? Il aurait fallu qu’elle aille en France. Chose qui ne lui convenait pas… Au passage, elle souligne qu’elle n’a jamais eu de réelle passion. Du coup, elle s’est retrouvée à faire du commerce en sachant que cela lui offrirait de nombreuses possibilités.
Neerusha Chuttoorgoon, 23 ans, vient tout juste de terminer son degré en Mass Communication. Tout comme Sonia, elle a été déçue par la job fair. « Je m’attendais à plus d’exposants », dit-elle. « Mais les workshops étaient très intéressants. Surtout ceux à propos de la préparation pour un entretien d’embauche ou encore quel genre de vêtement porter ». Elle avait espéré trouver un emploi en se rendant à la job fair. Bien qu’elle n’ait pas eu de confirmation, elle révèle que cela l’a beaucoup aidée de rencontrer les employeurs. « Je n’ai jamais travaillé et donc, je n’ai pas beaucoup d’expérience sur ce que les compagnies recherchent vraiment. Je ne savais même pas comment remplir un formulaire d’embauche. Les représentants m’ont appris comment faire cela ». Sans expérience, elle est tout de même volontaire à PAWS. Avec son major en journalisme, elle compte continuer dans ce domaine. Elle a envoyé plusieurs CV à différentes compagnies mais ses efforts restent sans réponse. C’est sur sa patience et sa persévérance que la jeune femme mise afin d’avoir un emploi.

Expérience exigée
« Nous demandons de l’expérience dans beaucoup de nos filières, chose qu’il n’ont pas pour le moment alors nous proposons aux jeunes de s’investir dans les domaine du back office où ils auront la possibilité de monter l’échelle en acquérant de l’expérience. Mais nous avons remarqué que l’attitude de certains jeunes ne va pas dans ce sens. Beaucoup veulent avoir directement un poste haut placé en fonction de leur diplôme mais cela ne se fait pas ainsi. Je pense qu’il y a un manque de volonté de leur part. S’ils voulaient vraiment du travail, ils accepteraient n’importe quel travail sans considérer les conditions », nous expliquent des conseillers de la banque MCB. Les entreprises semblent très mitigées quant à la motivation réelle des jeunes à trouver du travail. Rentrer dans la vie professionnelle semble ne pas les intéresser, selon les employeurs interrogés. À la job fair du CTI, les jeunes ne se sont pas déplacés en masse pour voir ce que les entreprises proposaient. Pour Ariane Casse de Businessatwork, « les jeunes cherchent une filière mais ils ne savent pas ce qu’ils veulent faire. Tout ce qu’ils savent c’est qu’ils veulent avoir un travail avec lequel ils gagneront beaucoup d’argent. Mais c’est une mauvaise façon de penser et cela se voit par leur attitude et la manière dont ils viennent nous aborder. Il faut vouloir et accepter de travailler en bas de l’échelle. Tout le monde commence par là mais ils ne le réalisent pas. Aujourd’hui je n’ai pas ressenti d’ambition de la part des jeunes. Je pense qu’il faudrait que les universités leur expliquent qu’il faut commencer au bas de l’échelle. Je pense que le système en lui-même est à revoir. Apprendre par cœur ne sert à rien dans la pratique. Ils choisissent aussi souvent leur filière en fonction de leur entourage, et rarement par passion ».
Boodhun et Nizam, deux amis, étaient à la Job fair de Triolet organisée par la National Empowerment Foundation samedi. Le sourire aux lèvres, ils nous confient être venus postuler pour un job. Cela fait six mois qu’ils sont en quête d’un boulot, et ils trouvent très difficile de se faire embaucher. « Les entreprises cherchent des personnes avec de l’expérience et on ne nous propose pas beaucoup d’argent », nous disent-ils. Interrogé sur ce qu’ils cherchent, nos interlocuteurs sont évasifs. « On cherche un peu de tout ». Toutefois, c’est autre chose en ce qui concerne leurs aspirations. « On cherche un meilleur avenir et un travail qui rapporte ; un toit sur la tête et une bonne voiture ».
Pour Divesh Mondary, de la compagnie LFL, il y a trop de demandes et pas assez de postes vacants : « Pour un poste nous avons eu plus de 500 CV, il va de soi que nous prendrons le profil de la personne qui aura le plus d’expérience. Beaucoup de jeunes, même s’ils ont leur diplôme, n’ont pas le profil qu’on recherche. Ils manquent de qualifications ».
Ashley Pusram, 21 ans, est lui aussi venu chercher du travail à Triolet. Contrairement à Boodhun et Nizam, il sait exactement ce qu’il cherche. « Je cherche un emploi dans le secteur interior design ». Cependant il rejoint Boodhun et Nizam en ce qui concerne la difficulté à trouver un travail. « Beaucoup de compagnies demandent de l’expérience, chose que je n’ai pas ». Le jeune homme fait ressortir qu’il aspire à avoir un « salaire parfait ». Loin de vivre dans les illusions, il ajoute tout de même avoir conscience qu’il faut « commencer au bas de l’échelle avant d’aller plus loin ».

Bonne maîtrise du français
Jemisha Bye Rammamohabeer de l’entreprise SEDECO nous a pour sa part expliqué que « nous ne demandons pas d’expérience aux jeunes car nous offrons une formation aux plus motivés. Dans notre domaine qui touche le journalisme web, le graphisme, la modération web, l’animation de service internet, nous avons beaucoup de demandes, par jour nous avons une dizaine de CV. Cela s’explique parce que nous ne visons pas forcément les diplômés mais tous les jeunes, même ceux qui n’ont pas eu leur HSC, car nous sommes conscients que de nos jours il sont de moins en moins nombreux à aller jusqu’au HSC. C’est une réalité à prendre en compte. Je pense que ce qui intéresse les jeunes à venir chez nous ce sont les horaires, qui sont très flexibles ». Lucinela Sutton, pour sa part, défend les centres d’appels : « Nous avons constaté que même si les centres d’appels sont répandus, les jeunes ne savent pas ce que c’est vraiment. Ils ne sont absolument pas renseignés. Je voudrais que les jeunes arrêtent les stéréotypes sur les centres d’appels, comme quoi ce ne sont pas des métiers d’avenir. Il faut savoir qu’on commence tous par être dans le centre d’appels puis avec les formations et l’expérience on peut facilement monter et avoir un bon niveau de vie. Avant il était important que les postulants aient une bonne maîtrise du français à l’oral mais nous exigeons aussi une bonne maîtrise de l’écrit maintenant. Ce sont les critères académiques que nous demandons, pour les autres critères il faut qu’ils soient motivés et dynamiques et prêts à commencer par le bas. »

Le look donne le ton à l’entretien
Le look va donner une première impression qui va conditionner le ton de l’entretien. Un minimum de sérieux s’impose. En effet, il y a des codes sociaux à respecter. En fonction de l’environnement de travail, telle tenue est requise et, donc, sera attendue. À titre d’exemple, pour la banque, le costume et la cravate s’avèrent une évidence pour les garçons ainsi que le tailleur pour les filles.
En revanche, dans d’autres domaines comme celui de la communication, les codes sociaux prennent un virage à 90°. En conséquence, une veste avec un tee-shirt branché plus une paire de jean noir donnera le côté arty-branché.
Une fois cette phase d’investigation préalable réalisée, un essai de tenue paraît plus que nécessaire. Surtout, si celle-ci diffère des vêtements que l’on porte d’habitude. En effet, il faut être à l’aise donc si l’on n’a jamais enfilé de costume et, à fortiori, de cravate, il ne reste qu’une seule chose à faire : s’entraîner. Ainsi, il faut tester une veste et un nœud autour du cou plusieurs jours avant afin de se familiariser avec ces nouveaux items. Pour les femmes, c’est exactement la même chose pour les talons : il faut s’entraîner.
Certains détails peuvent être primordiaux, notamment sur le choix de certains tissus. Il ne faut pas que ça gratte, que l’on étouffe, que l’on grelotte. Ou encore sur le choix de la taille.
Le jour de l’entretien, il faut essayer de ne pas trop en faire. Ainsi, pour les filles, un parfum léger sera suffisant, pas besoin d’enivrer l’assistance. S’agissant du maquillage, celui-ci doit être discret, ce n’est pas un concours de beauté. Côté masculin, une coupe de cheveux quelques jours avant peut être utile. Y aller la veille devient contre-productif.

Stage pour les élèves du secondaire
Le Human Resource Development Council (HRDC) lancera son programme de stage pour les élèves du secondaire pendant les vacances d’août. Ce programme comprend des stages de 2 à 3 semaines, qui visent à favoriser l’acquisition de savoir-faire pratique. La cible : les élèves de la Lower VI qui souhaitent acquérir une expérience pratique par le biais d’un stage. 165 élèves de 55 établissement du secondaire sont attendus pour ce programme. Ils se verront offrir un stage pendant les vacances scolaires du 29 juillet au 8 août.

Génération chômeuse
Les jeunes chômeurs sont une vraie préoccupation pour les gouvernements. Plus de 75 millions de jeunes sont sans travail à travers le monde. Notamment 26 millions provenant des pays développés, un chiffre qui est en hausse de 30 % depuis le début de la crise en 2007. Même en Asie, le taux de jeunes sans travail en 2011 était 2,8 fois plus élevé que celui des adultes. Un chiffre qui est assez alarmant…Le Bureau International du Travail (BIT) explique que « nombre de jeunes connaissent le chômage de longue durée dès leur arrivée sur le marché du travail, une situation qui n’était jamais observée lors des précédentes récessions économiques ». Selon leurs dires, 6,4 millions de jeunes ont été découragés à chercher un boulot surtout dans les économies développés et l’Union européenne. Le BIT a par ailleurs fait ressortir que les jeunes connaissent des périodes de chômage et de découragement aussi longues que précoces. Ils laissent entendre que beaucoup de jeunes à travers le monde se retrouvent avec un emploi à faible productivité, temporaire ou avec un statut qui n’est pas à la hauteur de leurs aspirations. 

 

Text by Le Mauricien

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