SC-HSC: le ministère de l’Éducation n’entend pas reculer

6 years, 10 months ago - May 28, 2017
SC-HSC: le ministère de l’Éducation n’entend...
Sur quoi s’appuie le ministère de l’Education pour exiger le paiement des frais d’examens ? Pourquoi une telle décision annoncée aussi abruptement, se demande les syndicats ?

«Nous n’avons pas pris cette décision de gaieté de cœur», explique Leela Devi Dookun-Luchoomun, ministre de l’Education. Mais elle évoque surtout un formulaire signé par les parents les engageant à payer la totalité des frais si leurs enfants ne respectent pas le critère des 90 % de présence. Ils étaient donc au courant, martèle-t-elle.

«Pourquoi est-ce que ces décisions sont prises en catimini ? Pourquoi n’est-ce que maintenant que l’on dit aux élèves qu’ils n’auront pas leurs certificats tant qu’ils ne paieront pas ?» s’insurge pour sa part Soondress Sawmynaden, président de l’Association des recteurs. Comme lui, les autres syndicats de l’enseignement secondaire dénoncent les décisions prises «à la va-vite et en douce».

Le ministère, lui, campe sur sa position : «Il faut réguler les absences dans les écoles.» D’ailleurs, dit-on, la mesure porte déjà ses fruits. Ne rien faire et permettre que les parents ne s’acquittent pas de leurs frais d’examens alors que les élèves n’avaient pas le taux de présence requis aurait été un pas en arrière, laisse-t-on comprendre dans le milieu.

Déjà, depuis au moins le mois de mai de l’année dernière, le formulaire en question a été envoyé aux parents. Mention est faite qu’ils doivent s’acquitter de la totalité des frais si leurs enfants ne respectent pas le critère de 90 % de présence. Ce document, soutient-elle, a été ratifié par le State Law Office (SLO)

Cependant, bien que le formulaire soit légal, les syndicalistes de l’éducation, à l’instar de Soondress Sawmynaden, rappellent que bon nombre de parents ne l’ont pas signé. «On ne peut donc pas les forcer à payer. Tout contrat dont le montant excède Rs 5 000 se doit d’être en écrit. S’il n’y a aucune signature, il n’y a pas matière à poursuite. On ne peut, donc, pas poursuivre les parents qui n’ont pas signé le formulaire», soutient Me Siv Potaya.

Des parents, à l’exemple de Bilkis Dilmohammed, expliquent qu’ils n’ont reçu que la première page de la circulaire. D’ailleurs, au moment de la polémique, plusieurs parents avaient dénoncé un manque de communication des recteurs qui n’avaient pas transmis tout le contenu du formulaire qui détaillait les conditions y relatives. Pour un syndicaliste de l’enseignement secondaire, cependant, formulaire ou pas, cette décision est une Policy Decision du ministère et il faut la respecter

Kadress Pillay, ancien ministre de l’Education, rappelle pour sa part qu’il s’agit de l’avenir de notre jeunesse. «Comie dimoune pren loan la banque apre pa kapav payer ? Il est bien beau de prendre un engagement, mais voilà il y a des parents qui n’ont pas les moyens.»

Une sanction illégale ?

«Je sais où ce je vais. J’ai consulté le State Law Office.» C’est ce que répond la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun à ceux qui s’opposent à la décision de contraindre les parents dont les enfants n’ont pas le taux de présence requis à s’acquitter des frais d’examens. Ce, en refusant de leur délivrer leur certificat. La ministre met en avant un document signé par les parents dans lequel ces derniers s’engagent à payer ces frais si leur progéniture n’affichait pas le taux de présence requis. Cependant, d’aucuns s’interrogent sur la légalité de la sanction même, c’est-à-dire le fait que le Mauritius Examinations Syndicate (MES) refuse même de remettre le certificat de Cambridge à un élève.

Préjudice aux élèves

Pour Lucien Finette, ancien directeur du MES, les choses sont claires : l’organisme agit en tant «qu’intermédiaire» entre Cambridge et l’élève en ce qui concerne les certificats. «Je ne suis pas en mesure de dire si la rétention est légale ou pas. Mais je sais que le rôle du MES dans ce cas s’arrête à la fonction de boîte aux lettres. Du point de vue de Cambridge, les élèves sont parfaitement en règle», observe-t-il. Il va plus loin en affirmant que la rétention des certificats est une «forme de violence contraire à la pédagogie et à l’éducation». Pour lui, la «sanction» imposée est «immorale»

Qu’en est-il au juste légalement ? Si des légistes du côté de la majorité n’ont pas voulu se prononcer, Me Siv Potayya est, lui, d’avis que la rétention des certificats «semble être illégale». L’avocat, qui évolue notamment dans le domaine de l’éducation, s’appuie surtout sur le fait que le contrat ne mentionne pas les certificats. «L’accent est mis sur le remboursement et non sur les certificats», explique l’avocat. «En retenant les certificats, préjudice est causé aux enfants. Or, ce sont les parents qui signent ces documents. Je ne pense pas qu’un représentant du State Law Office ait pu recommander une telle chose.»

Par ailleurs, Me Siv Potayya avance que les parents et les élèves dont les certificats ont été retenus ont suffisamment de points pour poursuivre le MES. Un point de vue entièrement partagé par Me Veda Baloomoody. «C’est un chantage illégal et immoral. C’est le plus fort qui gagne», explique le député du Mouvement militant mauricien (MMM). Il est d’avis que le certificat est un «bien personnel» d’un enfant et que ce genre d’action ne peut être entreprise dans une démocratie.

Ce qu’ils en pensent

Kadress Pillay, ancien ministre de l’Éducation : «Je ne crois pas qu’on puisse faire du chantage à des enfants sur leur éducation. Le certificat est une fierté, on ne devrait pas faire cela. S’il faut payer, il faut payer mais il faut trouver un autre moyen. S’arranger avec une banque pour des prêts, par exemple.»

Vikash Ramdonee, président de la Government Secondary Schools Teachers Union : «Je ne veux pas entrer dans cette polémique, mais les lois sont les lois. Le ministère doit savoir ce qu’il fait.»

Soondress Sawmynaden, président de l’Association des recteurs : «Ce sont des décisions en catimini. D’abord, le ministère annonce aux élèves qu’ils doivent payer leurs frais d’examens dans une semaine. Maintenant, on leur dit, à la veille des admissions à l’université qu’ils ne recevront pas de certificats s’ils ne paient pas. Cela cache quelque chose.»

Yahya Parouty, président de l’Union of Private Secondary Schools Educators : «Nous allons descendre dans la rue s’il le faut. Nous ne pouvons pas permettre qu’on fasse du chantage à nos enfants. Malheureusement, nous ne pouvons pas mettre une injonction en cour mais nous allons en parler avec d’autres syndicats et faire un front commun.»

Peut-on se passer du certificat ?

Les élèves ont tous reçu un Statement of Results en marge de leurs résultats du SC et du HSC. Peuvent-ils se contenter uniquement de ce document à défaut de certificat ? Non, explique une source à l’université de Maurice. Le document n’est pas officiel, fait-on valoir. Cependant, pour les élèves ayant complété le SC l’an dernier, la tâche s’annonce plus facile. Certaines universités ne demandent qu’un certificat du HSC pour l’inscription.


«Immoral, illégal, inacceptable»

Ce n’est rien de plus que du chantage, a affirmé Steve Obeegadoo en commentant la décision du ministère de l’Éducation de retenir les certificats des collégiens. Du moins pour ceux n’ayant pas le taux de présence requis et qui doivent s’acquitter de leurs frais d’examens. Lors d’une conférence de presse, hier, le porte-parole de l’éducation du MMM a demandé au ministère de l’Éducation de faire preuve de «bon sens» et de revenir sur sa décision. «Dans quelle démocratie un gouvernement peut-il faire du chantage de la sorte ? C’est inacceptable, immoral et illégal.» Quant à la mesure portant sur l’obtention de cinq credits pour pouvoir prendre part aux examens, Steve Obeegadoo a demandé qu’elle soit mise en suspens. «Il faut de la transparence. Parmi ceux qui ont été admis en 2017, quel pourcentage d’élèves n’ont que trois credits ? Le ministère de l’Éducation n’a pas le droit moral de prendre cette décision sans fournir d’explication.»


«Fermer l’accès à l’éducation»

Lors de la conférence de presse du PMSD vendredi, Aurore Perraud a critiqué la façon de faire du ministère de l’Education sur le remboursement des frais d’examens. La députée bleue a soutenu que ce sont les élèves de l’élite qui sont les plus avantagés. «Notre système est contre l’intérêt des personnes au bas de l’échelle. Nous sommes en train de fermer l’accès à l’éducation en masse. Le ministère doit être plus compréhensif dans son approche», a-t-elle déclaré.

Parole aux parents et élèves

«Je ne vais pas payer»

En septembre dernier, Bilkiss Dilmohammed était toujours à l’avant des diverses manifestations menées contre les frais d’examens du School Certificate (SC) et du High School Certificate (HSC). Pour cette mère d’une élève en SC, il n’est pas possible que le ministère mette des conditions à une mesure si près de la date butoir. «Sé par prinsip ki mo pa pou péyé. Li pa zis séki zot pé fer», soutient-elle. Est-ce que le fait de ne pas avoir de certificat pèsera dans la balance ? Elle n’en est pas encore sûre.

«Pas les moyens»

«Présence ou pas, je n’ai simplement pas les moyens de payer Rs 14 000.» Pallavi Proag, qui n’a pas les 90 % de présence requis à l’école, est désemparée. «Ce n’est que jeudi, en me rendant à l’école que j’ai su que le MES a retenu les diplômes.» Du coup, cette habitante de Vallée-des-Prêtres ne sait pas si elle pourra entamer des études supérieures. Elle a déjà soumis son dossier pour être admise à l’université de Maurice. Mais il lui faudra le diplôme original, qu’elle doit soumettre dans deux semaines. «J’ai été à la Sécurité sociale et on m’a dit qu’il n’y a pas de mécanisme d’aide pour cette année.»

«Je viens d’une famille modeste»

Zaina Shadoobuccus, ancienne élève du collège d’État Droopnath Ramphul, confie qu’elle a pu s’acquitter, de justesse, de la somme requise pour qu’elle ait son certificat. «Je viens d’une famille modeste. Rs 14 000 ce n’est pas une petite somme à trouver du jour au lendemain», s’indigne la jeune fille. «Ma mère travaille à l’usine et mon père cumule le boulot de chauffeur et celui de planteur. Si on nous avait avertis depuis avant et qu’on nous avait donné un délai raisonnable, on aurait pu prendre les précautions nécessaires pour cet argent.»

«Descendre dans la rue»

«J’ai dû trouver Rs 14 139 du jour au lendemain. J’ai dû emprunter de l’argent», explique Annick Quirin, parent d’une élève du HSC. Mais elle n’abandonne pas la bataille pour autant. Sa fille Caroline et elle-même se disent prêtes à «descendre dans la rue» pour se battre. «Cette mesure a été prise dans une telle cacophonie, c’est incroyable d’avoir à payer le prix d’un manque d’organisation et de décisions prises à la dernière minute», s’insurge Annick Quirin. Mais elle a dû se résoudre à payer puisqu’elle doit aller inscrire sa fille à l’université ce lundi. Et ce, même si elle avait déjà déboursé Rs 20 000 pour l’université mercredi dernier.

«Trouver Rs 14 000 du jour au lendemain»

Ishwanee Ujoodah, habitante de l’Aventure, près de Flacq, explique que depuis le décès de son père, c’est sa mère qui subvient aux besoins de la famille. Celle-ci perçoit une pension de la sécurité sociale. Aujourd’hui, la jeune fille doit trouver Rs 14 139 pour recevoir son diplôme de HSC. Elle explique que c’est la distance entre son village et son collège, le Forest-Side SSS, qui est derrière ses nombreuses absences de l’école, soit environ 16 jours en un an. «Ce n’est pas évident de perdre plus de trois heures dans le transport chaque jour pour aller à l’école alors qu’on a terminé le programme d’études et que je peux réviser à la maison. De plus, ce sont surtout les jours de Sports Day, Music Day et d’autres jours où il n’y avait pas de classe, ainsi que les jours précédant les examens, que je me suis absentée.»

«D’accord pour payer»

Hema Jeerbhoohun, du collège GMD Atchia, a effectué le paiement depuis décembre dernier. Quand elle s’est rendue à l’école pour récupérer son diplôme, on l’a informée qu’il lui fallait se rendre au MES munie de l’attestation de paiement. «On était au courant depuis le début de l’année qu’il ne fallait pas s’absenter. J’en avais déjà discuté avec mes parents et ils étaient d’accord pour payer.»

«Emprunter de l’argent à des proches»

«Mon père est chauffeur de taxi. Il veut me donner une bonne éducation, m’envoyer à l’université. Il a dû emprunter des proches pour pouvoir payer mes frais d’examens. De plus, on nous impose ce paiement la même semaine qu’il faut payer pour les inscriptions à l’université», confie pour sa part Nandeeta Jawaheer. Cette dernière explique qu’elle s’était absentée du collège pour terminer un «un projet final» pour une de ses matières. «Je ne pouvais le faire pendant les heures de classe. Je ne me suis pas absentée pendant les deux premiers trimestres mais par la suite, j’ai dû le faire car l’échéance pour le projet arrivait».

Text by lexpress.mu

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